Deux jours de préparation de conférence dans les Cévennes

Dans quelques jours je présenterai avec mon ami et collègue Gilles Roustan une conférence en duo lors de l’édition 2016 du forum de l’AFUP. Pour nous préparer nous nous sommes retirés le temps d’un week end au coeur des Cévennes.

S’isoler pour faire

S’isoler dans un lieu retiré pour travailler, l’idée n’est pas nouvelle. D’autres artisans développeurs du sud de la france le pratique même régulièrement. Profiter du calme et de la beauté du parc national des Cévennes pour un séminaire de travail, ce n’est pas non plus très original. Si l’on a décidé de faire pareil pour préparer notre conférence, c’est que la méthode fonctionne.

Imaginez : vous quittez votre vie citadine pour rejoindre, à deux heures de route de Montpellier, un petit village de pierre accroché à la montagne. Caché au milieu des châtaigniers, quelque part à mi-chemin entre le Vigan et Saint-Jean du Gard. Dans une de ces dernières zones où un smartphone n’est plus d’aucune utilité faute de réseau disponible. Où le silence n’est perturbé que par le bruit de l’eau qui s’écoule depuis les hauteurs du Mont-Aigoual.

Le hameaux des Faveyrolles dans les Cévennes.

Au calme dans le gîte de Stephan, une ancienne ferme cévenole rénovée, nous nous sommes concoctés un petit programme de travail et de discussions au coin du feu. Le tout entrecoupé de promenades et de petits repas familiaux.

Des post-its dans les valises

Bizarrement on pourrait croire qu’un tel environnement invite à flâner. Il n’en est rien, au contraire. L’isolement coupe toute tentation et empêche de s’éparpiller. Nous avons donc été très productifs durant ces deux jours.

Des gens, des valeurs, des idées

Dès notre arrivée, la première chose que nous avons faite c’est nous mettre d’accord sur ce que nous souhaitons faire de nos quarantes minutes de scène au Forum PHP. Une première séance de travail nous a donc permis de nous aligner sur pourquoi nous prenons la parole et quel(s) message(s) nous souhaitons passer.

Des post-its collés sur une des fenêtres du gîte.

Chacune de ces idées est notée sur un post-it et affichée sur le mur. A ce stade on obtient beaucoup de matière. Beaucoup d’idées, parfois qu’y s’entremêlent, parfois qui s’opposent. C’est cette matière première qui donnera, avec un peu de méthode et beaucoup d’échanges, corps à notre histoire. Mais c’est aussi, et surtout, l’occasion de se poser une question très importante : qu’est ce que je souhaite que les gens retiennent ? Quel est mon message ?

C’est une étape que j’apprécie quand je travaille seul, sur un article par exemple. Mais lorsque vous travaillez sur un projet à plusieurs, elle est indispensable. Elle permet de s’accorder sur ce que vous êtes en train de faire.

À deux on va plus loin

Si travailler à deux suppose une étape préalable où il faut s’aligner pour être sur la même longueur d’onde, cela ne rend pas le travail d’écriture d’une conférence plus difficile. Au contraire, il y a des avantages.

L’intérêt de faire une conférence en binôme est double. Travailler en équipe est toujours plus facile. Pour l’anecdote, il y a quelques mois, quand je me suis lancé dans l’idée de refondre le parcours de commande de 1001pharmacies, j’étais parti pour me lancer seul, bille en tête. Un collège m’avait à l’époque indiqué que, si je pensais que seul j’arriverais à faire plus de choses je me trompais. Il avait raison. Travailler seul, on a l’impression de travailler plus vite. Mais on va surtout moins loin.

Être à deux permet aussi de se donner la réplique et de repêcher son partenaire. La conférence de Frank et Bertand de Paris Web m’a ouvert les yeux à ce propos. C’est vrai que, lorsque je faisais du théâtre il y a quelques années, lorsque l’un d’entre nous perdait le fil de son texte, il y avait toujours quelqu’un de la troupe pour venir l’aider à rebondir. Bien sûr, le public ne s’apercevait jamais de rien.

Si vous hésitez à monter sur scène, je vous conseille vraiment de le faire à deux. D’abord cela vous apprendra à travailler en groupe si ce n’est pas le cas. Ensuite, vous pourrez compter sur votre partenaire pour vous aider à prendre la parole une fois sur scène. Et le résultat en sera plus agréable à voir qu’une conférence en solitaire.

Écrire une histoire

Une fois que vous avez toute votre matière, vos idées, il va falloir les enchaîner de manière cohérente. Leur donner la forme d’un récit.

Les messages

Toujours sur des post-its, on étale une à une chacune des idées que l’on souhaite développer. Si vous utilisez des diapositives lors de votre présentation, chacune de ces idées pourra être illustrée et faire office de diapositive à présenter.

Gilles travaillant à l'écriture de la conférence avec des post-its.

Le plus généralement, il faut tenter de privilégier des images, des illustrations. Quelque chose de visuel plutôt que du texte ou du code. Si vous demandez à votre auditoire de lire du contenu dans vos diapos, vous allez le perdre. C’est doublement vrai si vous rédigez du texte en anglais pour une conférence francophone. Cher amis, arrêtez de vous croire à Los Angeles et faites des diapos accessibles à tous, en France. Ca sera un bon début.

Avec une photographie vous pourrez passer un message, illustrer votre propos. L’idéal étant de trouver des images chargées en émotions. Provoquer des émotions chez les gens qui vous écoutent facilitera l’accès à leur mémoire par vos idées.

Lors de notre préparation, Gilles aura fait une contribution intéressante à ma méthode. À l’aide de post-its plus petits il a détaillé chacune de ces idées en plusieurs points. Les agrémentant d’anecdotes, de concepts théoriques, de références ou en les re-exprimants sous différents aspects.

Les transitions

Une fois que vous avez toutes vos idées, enchaînez-les. Trouvez des liens entre chacune d’entre elles. Ces transitions vous aiderons à passer d’une idée à l’autre tout en restant fluide.

Des post-its alignés sur la table de la terrasse du gîte.

Aristote avait compris que la dramaturgie et l’art de raconter des histoires permettent de transmettre un message. Ne sous-estimez pas le pouvoir mémorisateur des conférences bullshit emplies de story-telling. Une fois que vous avez dépilé vos idées sur des post-its, donnez leur une cohérence de groupe. Pour ce faire, un récit c’est le meilleur moyen.

Par exemple pour ma conférence de Sud Web sur les Legos, je souhaitais parler de mon métier de développeur. De mon ras-le bol d’être interrompu à tout va, de mon agacement à travailler dans des équipes entièrement masculines, de mon énervement face au web prêt à porter de CMS convenus, de créativité et surtout de ma volonté farouche de ne pas devenir chef de projet. Pour cela, j’ai réuni toutes ces idées au sein d’une histoire autour des Legos. Les valeurs de la firme danoise m’ont servi de prétexte pour développer ces thèmes et le résultat, je l’espère, aura été plus efficace qu’une lecture plus convenue de mon métier.

En racontant une histoire, vous pouvez jouer avec les émotions de votre auditoire. Plus vous parviendrez à provoquer un état émotionnel fort, plus votre discours sera ancré dans la mémoire des gens.